Utilité et faisabilité de la surveillance de la COVID-19 à l'aide du suivi du SRAS-CoV-2 dans les eaux usées : une revue de littérature

Contexte

Alors que la pandémie COVID-19 est toujours bien active, le monitorage de la circulation du virus SRAS-CoV-2 dans les eaux usées est un domaine en pleine expansion. Cette méthode est en effet de plus en plus proposée par certaines autorités nationales et internationales comme un instrument de surveillance complémentaire à la surveillance sanitaire classique pour suivre le virus et ses variants dans la population afin de détecter d’éventuelles résurgences et intervenir le plus tôt possible. 

Afin de soutenir les acteurs de la santé publique au Québec, le Groupe Scientifique sur l’Eau (GSE) de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) a dressé un portrait de l’évolution des connaissances scientifiques sur l’utilité et les conditions de faisabilité de la surveillance du SRAS-CoV-2 dans les eaux usées, dans une perspective de santé publique. 

Objectifs

Les objectifs suivants étaient poursuivis :1) valider la valeur ajoutée du suivi des données sur la présence de SARS-CoV-2 dans les eaux usées à la surveillance de la COVID-19 à l’aide des données épidémiologiques; 2) explorer les options méthodologiques à privilégier, les barrières et les facteurs facilitants l’intégration des données des eaux usées au système de surveillance sanitaire de la COVID-19 et 3) documenter les critères pour la prise de décision et les interventions des autorités de santé publique qui pourraient découler de la mise sur pied d’une telle surveillance des eaux usées.

Méthodologie

La recherche documentaire de la littérature scientifique a été faite à l’aide des bases de données bibliographiques Embase, Environment Complete et Pubmed. Les études primaires, révisées par les pairs, publiées en anglais et en français entre le 17 novembre 2019 et le 2 février 2021 ont été retenues pour la synthèse à l’aide d’un processus de sélection et d’extraction des données réalisé par au minimum deux évaluateurs de façon indépendante. Des critères d’inclusion et d’exclusion très stricts ont été appliqués et une évaluation de la qualité des études retenues a été effectuée. Cette synthèse a été complétée par une consultation de la littérature grise.

Résultats

11 études écologiques et une étude de modélisation ont été retenues. L’analyse approfondie de ces études primaires a permis de dégager les constats suivants : le choix de la méthodologie d’échantillonnage tel que le site, le type et la fréquence d’échantillonnage ainsi que de la méthode de concentration, d’extraction, de quantification et de normalisation du signal SRAS-CoV-2 dans les eaux usées sont variables et peuvent influencer les résultats. Les associations quantitatives entre les deux bases de données reposent sur des hypothèses qui ne sont pas encore complètement validées. L’utilisation de plusieurs indicateurs épidémiologiques et en particulier ceux concernant l’incidence permet d’améliorer les corrélations des données sanitaires avec celles des eaux usées. La surveillance des eaux usées semble être un outil plus utile lors de l’augmentation rapide des cas. Il constitue un signal indépendant d’alerte précoce de la circulation du virus non influencé par la variation des politiques de dépistage. Cependant, l’information obtenue de cette surveillance doit être disponible en temps opportun. À noter que la qualité des études sur le sujet est jugée moyenne et que les résultats doivent donc être interprétés en fonction de ces limites. 

Conclusion

Certains éléments devraient être considérés pour améliorer l’utilisation et l’applicabilité de cette surveillance pour soutenir les décisions et les actions de santé publique. Les pistes de recherche suivantes sont proposées : 1) déterminer les facteurs déclenchants pour des actions de santé publique et les interventions à privilégier ; 2) décrire et mesurer les sources d'incertitude et de variabilité ; 3) viser davantage de standardisation méthodologique, 4) améliorer les échanges entre les chercheurs en génie environnemental et les intervenants de santé publique.