Insécurité alimentaire avant et pendant la pandémie de COVID-19 au sein de ménages d’enfants traités dans une clinique pédiatrique de la région de Montréal.

Contexte et objectifs : L’insécurité alimentaire est un état dans lequel un ménage démontre des signes que la quantité ou la qualité des aliments consommés est compromise (insécurité alimentaire modérée) ou des signes de réduction de l'apport alimentaire et de perturbation des habitudes alimentaires (insécurité alimentaire grave). Elle est associée à plusieurs problèmes de santé physique et mentale tels que l’obésité et la dépression. Depuis mars 2020, la pandémie de COVID-19 a exacerbé l’insécurité alimentaire, particulièrement chez les groupes vulnérables comme les personnes issues de l’immigration.

Les objectifs de cette étude sont de (1) dresser un portrait de la situation de sécurité alimentaire et (2) déterminer si la prévalence d’insécurité alimentaire est différente depuis le début de la pandémie de COVID-19 au sein des ménages d’enfants impliqués dans le programme multiprofessionnel d’acquisition d’un mode de vie sain de la Maison de Santé Prévention - Approche 180 (MSP-180) de Montréal.

Méthode et démarche : Cette étude est une analyse rétrospective transversale réalisée à partir des données médicales des enfants impliqués dans le programme multiprofessionel d'acquisition d'un mode de vie sain à la MSP-180 de Montréal. Les enfants âgés entre 2 et 17 ans dont la prise en charge à la MSP-180 de Montréal a débuté entre le 1^er juillet 2017 et le 31 mars 2021 et dont au moins un parent a complété le Module d'enquête sur la sécurité alimentaire des ménages (MESAM) de Santé Canada lors de la première visite à la clinique ont été inclus dans l’étude. Le MESAM permet de catégoriser les ménages selon le niveau de sécurité alimentaire. La prévalence d’insécurité alimentaire avant la pandémie de COVID-19 a également été comparée à celle après son début le 13 mars 2020.

Résultats : Deux-cent-cinquante-deux enfants ont été inclus dans l’étude, dont 127 (50,4%) filles et 125 (49,6%) garçons avec un âge moyen de 11,3 ± 3,2 ans et un indice de masse corporelle (IMC) moyen de 29,8 ± 6,5 kg/m². De plus, 145 (57,5%) d’entre eux étaient des personnes immigrantes de 1^re ou 2^e génération et 82 (32,5%) des personnes de 3^e génération. Enfin, 220 (87,3%) enfants ont eu leur premier rendez-vous à la MSP-180 avant la pandémie de COVID-19 et 32 (12,7%) pendant la pandémie.

Les ménages de 151 enfants (59,9%) étaient en situation de sécurité alimentaire (incluant 52 ménages en insécurité alimentaire marginale (20,6%)), alors que 101 ménages (40,1%) étaient en insécurité alimentaire modérée (n=88; 34,9%) ou grave (n=13; 5,2%). L’insécurité alimentaire était particulièrement prévalente parmi les ménages situés dans Montréal-Nord (17/25 ménages) et Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension (9/19 ménages). L’insécurité alimentaire était plus prévalente chez les ménages de patients immigrants de 1^re et 2^e génération comparativement aux ménages de patients de 3^e génération (48,3% vs 29,3%; P=0,02).

La prévalence d’insécurité alimentaire dans les ménages des patients ayant eu leur premier rendez-vous avant et pendant la pandémie de COVID-19 n’était pas statistiquement différente (39,1% vs 46,9%; P=0,50).

Conclusion et recommandations : Plus du tiers (40,1%) des ménages des enfants traités à la MSP-180 de Montréal étaient en situation d’insécurité alimentaire au moment de leur première visite. La majorité des ménages en situation d’insécurité alimentaire provenaient de Montréal-Nord et Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension. La prévalence d’insécurité alimentaire était plus élevée dans les ménages des enfants qui sont nés ou qui ont des parents nés à l’extérieur du Canada. Finalement, malgré une tendance à la hausse d’environ 8% au sein d’un échantillon limité, l’insécurité alimentaire n’était pas statistiquement plus élevée depuis le début de la pandémie de COVID-19 comparativement à avant.

Cette étude a permis d’identifier des facteurs associés à l’insécurité alimentaire qui permettront d’individualiser les interventions visant l’acquisition de saines habitudes de vie à la MSP-180 de Montréal.